A l'heure de Rio + 20, où en est le développement durable ?

A l'heure du Rio + 20, les institutions internationales à l'initiative de la Conférence, les Etats et les groupes de pression industriels, altermondialistes ou environnementalistes vont tenter de donner une nouvelle impulsion au Développement Durable. Le bilan de vingt ans de diffusion et d'expérimentations pratiques est difficile à établir, mais les grands chiffres de l'économie mondiale tendent à dire que le développement durable n'a pas réussi à faire changer significativement les logiques de production et de financiarisation dominantes.
Les intentions du Développement Durable en 1992 semblaient utopiques et pourtant le monde entier en parle et tente, aujourd'hui de les pratiquer. Partant de rien dans les années 90, les promoteurs et militants du DD ont réussi, vingt ans après, à créer une conscience, un background technique et un foisonnement théorique qui ont ouvert la pensée écologique, économique et philosophique. Autant de conditions à un changement profond et auto-alimenté, comme une réaction en chaîne. L'utopie semble pouvoir devenir réalité, car le changement ne dépend pas d'un pouvoir centralisé, ni de la pensée d'un seul homme (ou femme). Plus encore, par la "green economy", les sceptiques d'hier voient une possibilité de relance de l'économie classique et joueront un jeu qui s'inscrit dans les trajectoires utiles. 
Le bilan est  donc plutôt bon si on admet que tout processus de changement nécessite avant tout l'établissement d'une "conscience du besoin de changer" entre les acteurs concernés. Rien ne peut se passer sans cela. Or, le chemin parcouru depuis les pionniers des années 60-70 est considérable et donne raison aux optimistes prudents. 
Le processus de changement peut alors se poursuivre en rencontrant moins de résistances si une proportion significative des "acteurs" est "consciente", même par opportunisme ou par obligation. Les étapes d'après sont donc la discussion du champ des possibles, des retours d'expériences duplicables ou généralisables, et une vision. 
Plus tard et par contagion, selon les jeux d'intérêts humains immoraux classiques, se crée un relatif consensus sur les objectifs, les trajectoires, les priorités, les compromis et les moyens d'une politique globale, nourrie des actions locales. 
A l'heure actuelle et dans le monde, les actions et politiques qui dominent correspondent à des objectifs de "soutenabilité faible" qui entretiennent le "business as usual", c'est à dire la préservation de l'ancien système en échec. Les proactifs et militants devront être patients et minimiser leurs regrets car si le processus suit sa progression, l'ancien système continuera à générer ses impacts négatifs jusqu'à ce que les forces de changement l'emportent. Pour les pessimistes, le bilan du Développement Durable comme "politique" ou comme " action collective" n'est donc pas bon et ils ont raison, mais on ne peut brûler les étapes d'un processus de changement véritable qui doit changer les cultures et les croyances,  instaurer une intelligence collective et faire évoluer des traditions sociales et économiques tenaces (spéculations, tricheries, individualismes, replis sur soi, guerres, influence, luttes de classes...), rien de moins. 
La question des objectifs collectifs, mondiaux est entière, ainsi que des menaces, des irréversibilités et des délais avant un éventuel point de non-retour, ou de basculement vers un autre rapport Homme-Biosphère plus agressif. Le rôle de la Science comme méthode et des scientifiques comme producteurs de savoir commun est essentiel, mais ne peut rien sans une reformulation politique et la constitution de la conscience collective évoquée plus haut. Mais les sciences ont des limites conceptuelles qui ne rendent pas compte de toute la complexité du monde et des sociétés humaines. La traduction mythologique, subjective et populaire des formes du bien-être (welfare), du besoin de changer et des trajectoires possibles et finalement des objectifs, apparaît comme au moins respectable et probablement déterminante pour imaginer des modes de vie prospères, viables, soutenables et responsables dans un contexte d'incertitude et d'incontrôlabilité de l'avenir. 
Le processus de changement soutenu par les crises économique, financière, sociale, écologique et politique mondialisée, appelle une approche de deuxième ou troisième génération, une nouvelle philosophie des intentions humaines et surtout, l'identification de nouveaux leviers et un redéploiement des moyens.
Les comportements de résistance au changement de certains acteurs puissants par leur poids économique (grandes entreprises, entreprises low-costs, traficants) et politique (dictateurs, impérialistes, pays émergents pratiquant le dumping, pays riches consommateurs massifs) peuvent être interprétés comme les derniers soubresauts avant le "grand basculement" (voir Severino & Ray 2011). Comme les crises majeures qui révèlent l'échec flagrant du commerce libre-échangiste, de la financiarisation non-régulée, (et du système bancaire), des politiques monétaires (premiers des protectonismes), des vertues des marchés, des politiques fiscales, etc... Le processus de changement initié dépasse les initiatives de Développement Durable toujours marginalisées par le système économique dominant. Des convergences sont apparues pour changer l'ensemble de l'économie et du rapport entre les peuples que le commerce mondialisé d'inspiration occidentale était censé faciliter. 
Il n'est pas sûr qu'un gouvernement mondial parviendrait mieux que le courant collectif, complexe et auto-organisé actuel à conduire le changement et à disqualifier progressivement ceux qui entretiennent l'ancien système (non-soutenable et non-responsable).

Tentative de bilan :
 
Le bilan est paradoxal donc complexe à établir, car le PIB mondial a cru de près de 7 fois son niveau de 1950 à nos jours et de près de 45% depuis vingt ans. La Banque Mondiale souligne que cette performance récente a engendré une réduction significative de la pauvreté moyenne mondiale, mesurée à la même aune. Mais cette vision des choses cache que le bilan environnemental n'est pas bon et que l'économie mondiale est en échec systémique sur ses performances écologiques et sociales. Dans les approches multicritères, un progrès sur un critère est souvent compensé par une régression sur d'autres, rendant les évaluations peu discriminantes. Les raisonnements en moyenne posent la question du sens de l'interprétation des indicateurs et des arbitrages de point de vue pour les interpréter. Les évaluations de performances sur le Développement Durable souffrent du manque de modèles d'interprétation des changements d'état des systèmes écologico-écononico-sociaux.
Les performances de la protection de l'environnement et de l'utilisation des ressources dans les pays riches (dits à "revenus élevés") et anciennement industriels, ont progressé significativement en moyenne. La communication des chiffres joue sur une stabilisation de tendances en pourcentages sur une série d'indicateurs à la mode comme les déchets industriels,, les émissions dans l'air, le traitement des eaux, la consommation d'énergie par unités de production, la productivité du travail, mais aussi les accidents professionnels, puis l'espérance de vie, etc... Mais ce paysage optimiste joue sur les échelles de représentation  de courbes assez constantes à la hausse, les valeurs initiales (très élevées par rapport au reste du monde, mesurées en général en 1990) et cache des paradoxes comme l'augmentation de la diversité (et de la toxicité) des molécules chimiques émises dans l'environnement, l'érosion de la biodiversité, la dégradation des eaux et des sols. Si la comptabilité de ce type de bilan raisonne en cycle de vie et reporte les coûts complets (environnementaux et sociaux) des filières aux produits consommés, alors  le diagnostic de l'économie actuelle est affligeant, même dans les pays à la réglementation exigeante. Ainsi, indirectement, en consommant des produits provenant des pays émergents qui exercent un dumping social et environnemental compétitif (prix apparents), les pays "développés" prennent une part de responsabilité dans les dégradations et les coûts cachés des activités à l'échelle mondiale. Depuis vingt ans, les délocalisations industrielles vers l'Afrique du Nord, Taiwan et l'Asie du Sud-Est, puis la Chine et l'Inde ont déporté les impacts des pollutions et de l'exploitation des ouvriers, des nations industrielles historiques vers les pays émergents qui portent la croissance de l'économie mondiale. Le découplage de l'argent (la finance) et de l'industrie (économie réelle de la production et des services) a exacerbé les spéculations sur les nouvelles technologies et les matières premières dont les valeurs flambent. Pourtant leur utilisation n'est toujours pas efficace au regard des enjeux de la soutenabilité du développement humain et de la responsabilité sociétale à organiser la prospérité pour tous.
Une financiarisation des activités a accru la part de l'économie mondiale générée par les entreprises multinationales (environ 2/3 en incluant les sous-traitants directs) qui privilégient la rémunération des actionnaires sur l'emploi et la redistribution (impôts et pouvoir d'achat), notamment dans les pays anciennnement industriels. On estime que les grandes firmes transnationales ont accru leurs profits de x11 (1100%) quand elles ont généré à peine 2% de création d'emploi sur une période de dix ans. Ce sont les PME-PMI qui créent l'emploi mondial, payent les impots et innovent aujourd'hui alors qu'elles ne génèrent que 1/3 de l'économie en dollar. Il est assez compréhensible que les boucles vertueuses production-consommation qui ont porté les économies capitalistes jusqu'à présent soient cassées. On peut se demander si les firmes transnationales sont utiles sociétalement. 
La croissance économique se tasse autour de zero dans les pays à monnaie forte alors que les pays émergents tentent de doper la leur au risque de surchauffe et de chocs. Les pays émergents consomment une part croissante des ressources mondiales et polluent presque autant que les pays dits développés (de l'OCDE) dont on s'inquiétait qu'ils puissent faire des progrès en 1992. Sous l'impulsion de la globalisation (libre échange et dumping social et environnemental), le monde de 2012 pollue plus en moyenne qu'en 1992, mais sa richesse en dollar explose et les spéculations changent l'échelle des raretés et des prix avant même que les pénuries physiques aient lieu. Il s'en suit un accroissement des inégalités dans le monde entier ; les 20% de la population mondiale les plus riches détiennent 92% des richesses en dollar. Les 20% les plus pauvres, seulement 0,07%.
La crise financière de 2007 révèle l'essouflement des politiques économiques basées sur la production et la stimulation de la consommation par des politiques publiques mal financées. Cette crise financière et économique, puis sociale appelle une refonte des fondamentaux "systémiques" du commerce, de la gestion des ressources et des technologies, du rôle des Etats investisseurs, assureurs, redistributeurs puisque les marchés ne le font pas. La prospérité semble devoir changer de support dans une perspective de croissance modérée, voire nulle, de la production mesurée par le PIB. On attend que les marchés intérieurs des pays émergents encore trop pauvres, prennent le relai de la demande des pays "riches" dont les monnaies sont menacées par les distortions des échanges. Le bilan de l'idéologie du libre-échange n'a pas été établi mais il apparaît de plus en plus que cette organisation et ses règles se retourne contre ceux qui l'on instauré ; les pays riches. D'aucun prédisent un retour des protectionnismes notamment en intégrant dans les prix (ou les barrières douanières)  les coûts réels des négligences sur l'environnement et les questions sociales.
Les bulles, les chocs, les crises sont devenus plus coûteux quand ils éclatent. Les grands perdants sont ceux qui ont placé leurs richesses sur des marchés financiers de moins en moins cohérents avec les réalités de l'économie et ceux qui tentent de financer leurs investissements ou de rembourser des dettes avec les rentes extrêmement fluctuantes de la vente des ressources sur les marchés standards mondiaux. Les grands gagnants sont ceux qui jouent autour de la table de poker des marchés financiers dont les positions sont maintenant réglées à la nanoseconde. Cette "finance" déconnectée de l'économie réelle (elle ne finance rien à long terme) représente aujourd'hui 15% de l'argent en circulation alors qu'elle était négligeable dans les années 70. Le monde est extrêmement riche, est doté de moyens techniques considérables, la population se stabilise à l'horizon du siècle, mais les inégalités sont substancielles et s'accroissent, les ressources diminuent et l'environnement est de plus en plus contaminé. L'économie ne finance pas efficacement les Etats non-plus, qui peinent à assurer le système (sauvetage des banques depuis 2009), à prendre en charge les coûts de l'éducation, de la santé, des infrastructures et du contrôle de l'équité (justice, police, décisions collectives) qui profitent pourtant aux entreprises.
Comment dans ce contexte, dresser le bilan du Développement Durable qui repose officiellement sur trois piliers (économie, environnement et social) dont l'intégration est censée assurer à l'économie une soutenabilité et une gouvernance responsable ?
Si le développement Durable doit être conduit par les forces publiques, on doit admettre un échec cuisant de ce qui a été fait depuis 20 ans, tant les marchés dominent le jeu et aggravent les constats pourtant alarmistes des années 1990. Les Etats n'ont pas les moyens de payer les coûts cachés des activités privées inassurables ou irresponsables. Si le Développement Durable est affaire de sensibilisation du consommateur et des entreprises, on doit constater que ce que l'on croit avoir gagné est anéanti par la contre-performance des pays émergents et l'hypocrisie des pays ou entreprises qui délocalisent les problèmes et les coûts pour accroître leurs profits. Depuis vingt ans, le monde a accentué le phénomène de "Commonize Costs and Privatize Profits"(the CCPP game), et les Etats, c'est à dire les contribuables qui globalement souffrent de la baisse de leur pouvoir d'achat, n'ont pas les moyens de prendre en charge ces coûts cachés de l'activité économique. Le manque de moyens des Etats va précipiter le système et toucher les "riches" avant même que les citoyens ne se révoltent, comme on le voit dans la crise européenne.
Le Développement Durable a été une création des institutions internationales en panne de projet pour guider les politiques économiques capitalistes dans les années 1990, à l'heure de la financiarisation de l'économie, de l'explosion de la puissance des firmes transnationales et de la chute des blocs idéologiques (URSS, Chine communiste fermée). Force est de constater que les marchés sont défaillants à assurer la prospérité de l'humain, à gérer les ressources et l'environnement. Cela révèle que le Développement Durable n'a pas réussi à devenir une politique. La représentation en "trois piliers" est probablement révélatrice d'une grande naïveté des concepteurs du "Développement Durable 1.0", à croire que les fondements de l'économie mondiale des années 1990 (logiques de marchés, libre-échange, technologies, politiques publiques en command/control, etc...) permettaient des changements, tout en gardant les mêmes idéologies sur le commerce et la finance.
Le "Développement Durable 2.0" ne pourra pas garder des bases classiques (néo-classiques dit-on) pour organiser l'économie et la politique (gouvernance). Or la méthode proposée encore aujourd'hui (Rio + 20) souffre de lacunes criantes sur les théories économiques, écologiques et sociétales qui fonderont l'économie soutenable et responsable tant espérée. La crise substancielle qui suit 2007 pourrait peut-être fournir le terreau d'un changement en rupture des paradigmes à mobiliser d'urgence, si l'on en croit les évolutions des discours dans les pays ou blocs traditionnellement libéraux que sont les USA et l'Europe.

Qu'attendre de la Conférence de Rio + 20 en 2012 ?

Le Développement Durable a tout d'abord proposé de remplacer le Progrès tombé en désuétude dans les années 80, alors que la seconde crise pétrolière sévissait et que les années Reagan-Thatcher initiaient le libéralisme et les politiques publiques du crédit à la consommation.
Ce même Développement Durable a inquiété les pays pauvres car le terme "développement" est fortement connoté par une période post-coloniale synonyme de pillage des ressources, dont le prix était maintenu très bas, d'influences troubles et de dettes difficilement remboursées. L'aide au développement a suivi un modèle économique dirigé par les besoins des chaînes de valeur ajoutée très profitables placées dans les pays du Nord. L'aide publique au développement ne représente aujourd'hui que de l'ordre de 0,7% des PIB des pays donneurs et moins de la moitié de l'aide privée envoyée par les diaspora travaillant dans la pays du Nord vers leurs familles du Sud.
Développement Durable ou soutenable peut sous-entendre dans les pays du sud "on ne va pas vous soutenir pour vous développer si vous ne respectez pas l'environnement" ou bien "vous ne devez pas développer votre industrie et il faudra acheter nos technologies et nos produits" ou bien encore "donnez-nous vos ressources, achetez nos technologies et nous vous autoriserons à vous développer"... A la façon dont les grandes entreprises minières et pétrolières, les investisseurs agricoles et les pêcheries industrielles ont exploité les pays pauvres mais détenteurs de matières premières depuis les indépendances, il faut reconnaître que les pays sont restés pauvres et il serait hypocryte de mettre ces situations sur le seul dos des régimes politiques corrompus.

Dans les pays du Nord, les entreprises n'ont pris le Développement Durable au sérieux que si leurs objectifs stratégiques devenaient compatibles et surtout si les réglementations se durcissaient. Aujourd'hui, peu d'entreprises ont profondément revu leur "business plan" en s'inspirant des objectifs de développement durable sur les plans environnementale et encore moins social (business as usual). Ce qui domine très largement est la "shareholder value (valeur pour l'actionnaire) et les stratégies par les coûts, c'est à dire la réduction drastique des coûts, pour quand on le peux ne pas réduire les prix mais doper les profits. Ces profits sont d'ailleurs assez peu taxés, surtout s'ils sont réalisés dans des structures complexes (transnationales) qui profitent de l'hétérogénéité des règles fiscales et comptables mondiales. La plupart ont adopté des politiques d'image, consacrant une part symbolique de leur activité à la cause pour acquérir une crédibilité sur le reste, quitte à communiquer habilement et à lancer des procédures arrangeantes de mise aux normes négociées avec les autorités par influence et lobbying. 
Les habitants et citoyens ont été sensibilisés selon les pays, aux menaces sur l'eau, sur la santé, la qualité de vie dans les villes ou aux abords des industries, etc... globalement un éveil s'est établi à mesure que les expérimentations démontraient la faisabilité des améliorations. Une relation a été établie entre les capacités à enrayer les pollutions et dégradations sur l'environnement et le revenu par habitant. Pour que l'environnement soit préservé, il faut être très pauvre et sans industries, ou riches et capables d'investir dans des technologies propres. Néanmoins, on observe que globalement l'argent amène la corruption et les dépendances aux opportunistes de "situation", démontrant une fois de plus que les marchés ne sont pas vertueux, ni au début, ni à l'apogée d'un cycle de maturité.
Le Développement Durable de première génération n'a pas réussi  à mettre en cause l'économie de production et de consommation "aveugles", produisant des déchets et considérant que les énergies et les ressources sont illimitées. Pourtant, les spéculations sur les matières premières et les ressources alimentaires poussent les Nations les plus mercantiles à converger vers une gestion intelligente de ces ressources. De même, le Développement Durable n'a pas réussi à imposer une morale sociale, mais les inégalités ou le travail mal rémunéré (esclavage moderne)  le dogme myope de la valeur pour l'actionnaire déstabilisent tous les régimes politiques ou de gouvernance d'entreprise. Là encore, le système économique que les initiateurs du Développement Durable de 1973 (Club de Rome), puis de 1992, avaient commencé à dénoncer avec utopie, s'est accentué et tend aujourd'hui à atteindre ses limites. Certains (...je) dirons que le changement ne peut se faire que maintenant et qu'il fallait avoir la patience de voir comment le Monde digérerait la chute de l'empire soviétique, les années Reagan-Thatcher, l'essor sans faute de la Chine et l'effondrement financier des pays dominants de "l'ancien Monde".

L'époque est donc intéressante depuis 2007, par les crises profondes qui mettent en cause les fondements de l'économie des pays du Nord et révèlent les dépendances aux énergies fossiles et nucléaire, l'inefficacité d'utilisation des ressources, les approvisionnements en produits à bas prix et enfin le nouveau rôle des pays producteurs émergents pour la stabilité financière. Autant de champs qui ouvrent l'opportunité que les utopies des pionniers des années 60-70 (Club de Rome) puisse se réaliser, en entrainant les grands acteurs par leurs intérêts les plus sensibles (l'argent), sans morale et certainement avec cynisme. Mais ce sera le résultat qui comptera. L'un des leviers majeurs est l'inversion des rapports de force entre blocs économiques (Nord-Sud et Emergents avec le reste du Monde) et l'impasse du développement des pays dits "développés". Leurs économies globalisées reposent sur une division du travail allant chercher toutes les opportunités de réduire les coûts/prix apparents et de concentrer les profits en externalisant ou en différant les risques, ce qui n'est ni soutenable/durable, ni responsable. D'autres stratégies sont nécessaires.

Les forces de la spéculation, de la recherche de profits à court terme et l'irresponsabilité sur le long terme empêchent le Développement Durable de s'intégrer à l'économie telle qu'elle est conçue par les économistes officiels. Là encore, la crise de 2007 qui n'est plus uniquement financière, donne beaucoup de crédit à la nécessité de rétablir un équilibre entre les volontés politiques et les règles de marché, cassant ainsi les mythes du libéralisme et du libre-échangisme.
Or il n'est pas sûr que l'on débatte à Rio d'une refonte de l'économie mondiale et des régulations ; autant de jeux qui occupent les G8, G20, Forum de Davos, Banque Mondiale et FMI...

Les lobbys sont considérables pour cantonner la Conférence de Rio + 20 dans des débats techniciens sans envergure politique d'une "inclusive green growth" telle que prônée par la Banque Mondiale mais dont on sent qu'elle propose une sorte de relance par les technologies "vertes" sans mise en cause des arbitrages politiques stratégiques sur les marchés, la dominance des firmes transnationales, la financiarisation, les spéculations et les profondes inégalités sociales.
La Conférence de Rio en 2012 est un négociation entre Etats et avec des parties prenantes influentes. On annonce déjà les points d'achoppement  qui vont bloquer certaines initiatives. En prennant du recul, il sera possible de conclure si la Conférence saisit les opportunités de répondre aux besoins de réforme d'une économie en crise profonde ou de maintenir le Développement Durable dans un statut de concept valise idéalisé mais bridé par ce qu'il cherche à réformer ; les règles économiques et financières.

Quelles peuvent être les pistes de cette révolution à laquelle le monde se prépare néanmoins ? 
 
Le Développement Durable 2.0, dont on va débattre à Rio en juin 2012, va devoir tirer les leçons de l'échec du Développement Durable 1.0, mais aussi de l'économie sur laquelle on croyait pouvoir s'appuyer en 1992. Bien que peu menacé par la diffusion des idées du Club de Rome, le système est en train d'exploser de lui-même et ouvre la voie à des stratégies plus complexes qui vont mobiliser les concepts du Développement Durable selon des trajectoires immorales, illégitimes, mais probablement efficaces. Les revendications des peuples pourraient bien entrer aujourd'hui en résonance avec la leçon reçue par les grands argentiers que moins de bulles et de chocs, ainsi qu'une meilleure répartition des richesses est la condition à ce que ce qui a été accumulé garde sa valeur (risques de dévaluation et besoin de nouveaux clients solvables).
La question énergétique est un facteur essentiel de ces mutations. La démonstration du fait que la domestication des énergies (exprimée en exergie ; voir Ayres & Warr 2009) est à l'origine de la croissance exprimée en % de PIB, depuis que les monnaies existent (17-18ème siècle). Or ces théories récentes heurtent les défenseurs des théories économiques classiques qui soutiennent que le Capital et le Travail, et pour certains les Technologies suffisent à expliquer les facteurs de la Production... et de la Consommation.
Reconnaître que l'énergie (exergie = énergie efficace et libre du point de vue thermodynamique ou physique) dirige et dope l'économie monétarisée mesurée en PIB a des conséquences nombreuses. L'une est de contredire les raccourcis intuitifs des "environnementalistes et écologistes politiques" qui évaluent que l'économie doit réduire sa consommation de ressources, notamment énergétiques, même renouvelables. C'est confondre efficacité et intensité énergétique et de matières, et mésestimer les contraintes physiques (flux de matière et d'énergies) et comportementales (commerce) de l'économie. Par exemple, pour instaurer une économie circulaire ou plutôt en spirale, qui recycle tout ou presque, il faut plus d'énergie. Le monde va devoir se propulser dans une économie de l'énergie propre et au plus près des besoins., mais très abondante, si elle veut jouer la carte des technologies pour soutenir la prospérité. La fin des réseaux centralisés de production -distribution d'énergie de puissance, dispendieux et aveugles est inéluctable tant pour des raisons d'inefficacité technique que de leur modèle économique. Une activité ne pourra subsister que si elle couple des cycles de matière à celui ou ceux des énergies, comme dans les écosystèmes naturels (Principe de Morowitz).
Plus encore, "l'optimum économique du Monde" (moins de chocs, moins de pertes, moins de globalisation  ; voir Ayres & Warr, 2009 et références académiques ultérieures) ne se fera que par un accroissement substanciel de la consommation intelligente de l'énergie (propre et efficace) nécessaire pour organiser en cycles (ou "spirale" sur plusieurs filières et échelles de temps-espace) et réduire les flux de matières plus ou moins domestiquées.
 
Le Développement Durable ou Soutenable 2.0 va devoir résoudre quelques questions de fond (en 10 points) :
1 – Le constat ou le diagnostic de la "non-soutenabilité environnementale des activités classiques" ne va pas de soi (car il brasse de très nombreuses connaissances), mais il est pourtant une condition préalable au changement. Certains signes comme l'augmentation des maladies liées à l'environnement (cancers, intoxications, etc...), les accidents majeurs sans solutions (Tchernobyl, Bhopal, Fukushima...), les abus des industriels (fuites de pétrole, contaminations autour des mines, traitements chimiques agricoles...), la baisse de fécondité des hommes et autres perturbations endocriniennes, etc... sont autant d'alertes qui s'imposent même aux plus sceptiques. Mais pour être utile et déclencher le changement, il va falloir dégager un consensus sur le "pourquoi changer ?" Le diagnostic va devoir combiner une gestion intelligente des données et concepts scientifiques, une mise en perspectives des solutions potentielles qui dessinent l'avenir, de nouvelles théories et une vision du Monde rendant l'espoir.
2 – La dimension politique du travail des scientifiques de l'écologie doit être clarifiée : peut-on envisager de domestiquer la planète ou doit-on préserver les écosystèmes naturels hérités du passé car ils garantissent le processus de Vie et la survie des humains (ce qui n'est pas sûr) ? et plus encore, une symbiose entre Sociétés humaines développées et Biosphère est-elle envisageable et sur quels critères ? Selon les scénarios proposés par les scientifiques, le Développement Durable va affiner ses objectifs pour une soutenabilité environnementale (la viabilité) et sociale (le bien-être des humains) plus ou moins radicale, qui paraissait utopique dans les années 1970 ou même lors de la Conférence de Rio en 1992. Mais ce ne sont pas les scientifiques qui doivent choisir les objectifs et encore moins les trajectoires, car leur science ne leur donne pas de réponse (à cause des incertitudes et de la complexité des phénomènes en jeu, mais aussi le fait que l'évolution biologique ne suit pas de destinée préétablie, vraissemblablement). L'humanité devra essayer et corriger, prendre ou ne pas prendre de risques., se donner une éthique quand aucune rationalité ne dicte ce qu'il "faut" faire... learning by doing. On sera surpris du résultat...
3 – Plus encore, le Développement Durable ne peut plus se satisfaire d'une théorie écologique qui définit les écosystèmes sans les humains. Quoiqu'on en dise et malgré les travaux de pionniers géniaux comme les frères ODUM dans les années 50-70, l'affirmation que l'Homme doit s'intégrer aux écosystèmes naturels sans les perturber, est un voeux pieux qui n'a pas de base scientifique démontrée ; surtout pas la récente "écologie industrielle" qui n'est qu'une métaphore. Une "écologie généralisée" va devoir formuler une théorie scientifique capable de nous éclairer sur les nouveaux rapports entre les systèmes a/ soumis aux lois de l'évolution biologique de long terme (les milieux naturels) et  b/ ceux, domestiqués, artificialisés et dopés par les énergies fossiles et les technologies, des humains, changeant la Biosphère à très court terme (anthropocène). Cette même théorie doit se relier d'elle même aux expertises empiriques les plus en pointe sur les capacités de la planète, révisant les calculs maladroits et imagés de "l'empreinte écologique". L'enjeu est considérable, car il consiste à clarifier dans un premier temps la séparation de la Science qui doit décrire des systèmes et des scénarios sans les juger (bons ou mauvais), de la Politique qui est le domaine du subjectif, de la vision du monde et des choix de trajectoires, voire de buts et de caps. Puis, il s'agit de prendre confiance dans les capacités des humains à trouver des solutions par l'intellect autant que par le ressenti, et devenir collectivement intelligents. Les intentions humaines font partie de ce que l'évolution biologique a produit et rien ne dit que les écosystèmes ne doivent évoluer brutalement sous l'influence humaine. La protection de la Nature ne se justifie pas par des arguments scientifiques de biologistes mais par un choix politique. Les scientifiques se trompent d'ailleurs et ne servent pas leur cause à décrire avec nostalgie "les merveilles d'une savane avec l'éléphant" tout en condamnant "la disparition de l'éléphant", alors qu'il est évéré que l'écosystème amputé d'une ou quelques espèces continue à évoluer et la Vie de se développer. quitte à changer de trajectoire. Le scientifique peut par contre souligner l'intérêt de conserver l'éléphant malgré les contraintes (cohabitation, gestion des populations dans des espaces restreints), si l'on décide (choix politique) que le service de cette espèce "clé-de-voute" est utile. La description des écosystèmes est de la science, mais décider de protéger l'éléphant est de la politique et se discute entre humains. Les humains doivent assumer que leurs intentions déterminent désormais l'évolution de la Biosphère,  qu'ils ne peuvent prendre modèle d'aucune autre espèce et qu'ils sont seuls pour décider. Le processus de Vie n'a pas de but prédéterminé (systèmes complexes auto ou hétéro-organisés) sauf à tendre à se complexifier malgré les accidents (nous en sommes à la sixième extinction massive de l'Histoire de la Vie) et les cycles dynamiques (panarchies). Les sociétés humaines participent à  cette diversification des formes de vie. Le processus de Vie de 5 milliards d'années a produit l'Homme industriel et la moindre des humilités est de tenter de comprendre le sens du changement qui s'opère sous son influence avant de juger si l'Homme est mauvais. L'Homme apprend et cherche sa place. Il a et va casser un peu ou même beaucoup pour faire émerger un autre système planétaire plus complexe à terme. La philosophie du Développement Durable doit se mettre dans cette perspective et éclairer l'émergence et les intentions humaines dans une perspective évolutioniste des systèmes hautement complexes qui caractérisent la Biosphère avec l'Homme. La survie de l'humain est bien sûr en jeu, mais les trajectoires pour l'assurer sont imprévisibles et incontrôlables. Il faut donc faire évoluer la doctrine et la morale du Développement Durable par une meilleure compréhension de "l'écologie de la Biosphère" ou de "l'écosystème planétaire" et son évolution. Une science élargie peut bouleverser les pensées classiques qui entretiennent la division (bons écologistes et mauvais industriels) et le pessimisme ou le fatalisme, voire le cynisme et la cupidité.
4 – Une "écologie généralisée" doit fournir aux théoriciens d'une "économie généralisée", des atouts pour relier les contraintes physiques et biologiques des activités humaines aux mécanismes de la prospérité et du bien-être ; il s'agit de sortir des métaphores à bout de souffle pour maîtriser les paramètres du métabolisme industriel et domestique et les moyens de rendre l'économie capable d'administrer la prospérité pour tous. Entendons par "économie", l'ensemble des paramètres de l'activité humaine, quelque soit la région du Monde et quelque soit le caractère licite ou illicite de celles-ci (économies grises et trafics). Il va falloir enrichir la théorie économique officielle, monétarisée et basée sur l'opulence matérielle... dont sont exclus entre 20 et 50% de la population mondiale (trop pauvres ou trop isolés). La théorie économique va devoir sortir de son pré carré terriblement restreint pour prétendre s'appliquer à tous les humains et toutes les institutions. Ce champ ouvre à l'idée de reconnaitre le troc, la création de monnaies spécialisées (currencies) ou locales, l'économie solidaire et sociale, les tabous sur l'argent et les taux d'intérêts (dictés notamment par certaines religions) comme tout à fait sérieux et modernes pour gérer la prospérité des Sociétés humaines, selon les régions et selon les liens sociaux ou les communautés.
5 – La non-soutenabilité sociale de l'économie actuelle ne fait pas non-plus l'objet d'un consensus et inspire une certaine fatalité, voire du cynisme. Pourtant, aujourd'hui, les plus riches financièrement  (monnaies "argent") et matériellement (individus, fonds financiers ou transnationales) vont devoir résoudre le paradoxe des inégalités car ils vont manquer de clients solvables pour entretenir la croissance des profits qui porte le système. Une sorte de fordisme mondial qui consisterait à mieux payer les pauvres pour entretenir la consommation, la production et les services – et faire des profits en comptant sur les facteurs multiplicateurs du système économique et monétaire gobalisé.
6 – Le Développement Durable est connoté politiquement, entre le Nord et le Sud, entre les conservateurs et les altermondialistes et entre les institutions et les entreprises et citoyens sans repères. Un "grand basculement" est entrain de s'opérer du fait des écarts entre les pays tellement riches que quelques pourcents de croissance d'activité équivaut à 40 ans de croissance à deux chiffres dans les pays pauvres. Les pays riches ne souffrent pas du ralentissement de leur activité mais des inégalités et des déséquilibres sociaux et politiques que cela occasionne. Les pays pauvres tentent de suivre un chemin décidé par les pays riches qui ont délocalisé une part de leur activité pour profiter des pays qui acceptent de ne ramasser que des miettes et de sacrifier leurs populations et leur environnement. Mais ce système est en train de basculer et les pays riches vont devoir inventer une nouvelle économie de "partenariats" Nord-Sud. Ce partenariat va aussi devoir emprunter largement aux concepts de Développement Durable pour justifier les barrières douanières non-tarifaires aux échanges (sécurité, santé, impacts environnementaux et sociaux des produits et services). Le Développement Durable doit muter en "économie verte" mais plus encore en "économie soutenable et responsable" et changer radicalement le jeu des marchés et des échanges internationaux. Il en va de l'influence (G20, ONU...) et de la survie (prospérité et solidité des monnaies) des pays riches, alors ça se fera.
7 – Le Développement Durable de deuxième génération doit trouver une autre réthorique et d'autres piliers. Ce sont la Soutenabilité d'une part et la Responsabilité d'autre part. Ces deux dimensions déterminent les trajectoires et les caps scientifiques et politiques d'une transition. Le Management des Transitions pour la Soutenabilité et la Responsabilité peut inspirer d'autres stratégies et d'autres politiques, en rupture et en réponse aux crises actuelles ; écologique, sociétale et économique.
8 – Les développements académiques les plus récents sur la soutenabilité et la responsabilité sociétale sont méconnus des conseillers en développement durable 1.0 qui tendent à brandir les quelques concepts à la mode (recyclage, éco-conception substitution, efficacité énergétique, empreinte écologique...). Pourtant, le Management des Transitions pour la Soutenabilité et la Responsabilité (MTSR) doit les mobiliser tous et générer des stratégies de transitions selon les cas.
9 – On montre des limites physiques aux concepts à la mode pour rendre l'économie soutenable. Pour réduire drastiquement la consommation de matières par une éco-ingénierie en rupture avec l'économie linéaire, il faudra plus d'énergie propre et efficace (exergie). Un optimum économique en découlera (modèle Ayres-Warr 2009).
10 – Même si on détermine des objectifs scientifiques de soutenabilité des activités, il n'est pas évident que les humains aient "l'intelligence collective" de mettre en oeuvre un système vertueux. Les questions de gouvernance de la Société conditionnent le management des transitions et l'adoption au fur et à mesure de trajectoires adaptées pour réaliser l'économie soutenable et responsable.

La politique peut et doit reprendre la main sur l'économie, instaurer un nouveau jeu de contrats et d'organisations, complexe, gagnant-gagnant (jeu à somme positive), de protections équitables aussi, entre les pays du monde, selon leur profil et niveau de technicité. Les patterns de la mondialisation des échanges peuvent changer dans cette perspective et rompre avec les réflexes de dominances coloniales, sans angélisme néanmoins, pour des affrontements plus francs entre peuples. Une relocalisation des activités est nécessaire, jouant à la fois sur les marchés intérieurs et internationaux avec des partenariats bilatéraux capables de créer des boucles vertueuses entre pays ou blocs ayant des différences historiques (cultures, frontières, souveraineté sur des ressources, inégalités ou contraintes environnementales ou géographiques)  ou stratégiques (différenciation, spécialisations). Le commerce doit redevenir une transaction entre des humains habiles et joyeux, voire roublards, tirant du plaisir à tout négocier. Le jeu de dupe, assymétrique et étouffé qui caractérise l'économie actuelle peut et doit redevenir une jeu complexe, plus humain, où l'on gagne à contribuer à la prospérité des autres. Comme dans les termitières ou les récifs coralliens, une nouvelle intelligence collective doit canaliser les intelligences individuelles que nous a donné l'évolution et instaurer un nouveau jeu entre les autorités politiques représentatives (institutions publiques), les entreprises ou firmes (privées et guidées par l'entreprenariat) et les citoyens-contribuables-travailleurs-individus au service desquels l'économie doit se mettre. Le jeu peut se baser sur une responsabilité sociétale, redéfinie par ce qui est assurable, utile et qui contribue à créer de la prospérité. Une activité ne se maintiendrait que si son utilité sociétale est avérée, "en coûts complets" ; sinon elle disparait par consensus.

A développer sans brides...

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